J’ai
toujours eu un rapport vraiment spécial à la nourriture, une espèce de relation
d’amour/haine plutôt destructrice. Je pouvais m’en priver pendant des jours et
d’un coup péter les plombs et manger jusqu’à en vomir ! Peu ragoutant je
le conçois, mais bon je n’étais pas la seule dans mon entourage à souffrir de
désordres alimentaires et j’imagine que cette relation passionnelle que
j’entretenais avec la nourriture me rassurait en quelque sorte. Je ne saurais pas
vraiment l’expliquer mais une tablette de chocolat pouvait à la fois être une
ennemie jurée et une meilleure amie rassurante. J’étais très instable quand il
s’agissait de nourriture, et j’ai beau avoir consulté des dizaines de
spécialistes de la diététique et de la nutrition, aucun ne m’a regardé dans les
yeux pour me dire une bonne fois pour toute « Mademoiselle, votre problème
est dans votre tête ». Tous m’ont fait des plans nutritionnels, m’ont
parlé des heures derrière leur bureau mais aucun ne m’a expliqué objectivement
la situation, aucun ne m’a clairement dit que tant que je ne m’accepterais pas,
faire des régimes serait inutile et ne me mènerait qu’à la frustration et donc
à une prise de poids encore plus grande par la suite. Ils mettaient ça sur le
dos de ma gourmandise et de mon manque de détermination j’imagine. Ma mère,
pourtant, a toujours cuisiné très sainement et très léger et ce, tout au fil
des ans, chez moi pas de biscuits, pas de gâteaux, pas de Nutella, comment
alors se faisait-il que je sois grosse ?
C’est
sûr, je n’étais pas vraiment grosse, mais quand on a 14 ans on se trouve
toujours trop grosse par rapport aux copines, et puis j’ai toujours été une
grande gourmande, j’adore les gâteaux, les biscuits, le chocolat, bref tout ce
qui fait grossir… Alors bien sûr quand après l’école, mes copines m’invitaient
chez elles pour le gouter et qu’il y avait du gâteau au chocolat, des petits
pains au lait fourrés de Nutella ou bien du cake aux fruits, je ne résistais
pas longtemps… Et les kilos ont commencé à venir s’installer avec la phase de
l’adolescence. Je n’étais pas vraiment grosse c’est vrai mais bon, j’avais
tendance à stocker les graisses et comme je n’étais pas très sportive (j’ai
fait quelques années de basket, mais des entorses à répétition m’ont fait
abandonné l’idée du sport), voir même sédentaire (hormis les deux heures de
sport obligatoires à l’école que je me débrouillais à faire sauter souvent),
j’ai commencé à prendre du poids petit à petit. Je voyais bien que je
grossissais, mais plus je grossissais plus je me sentais mal et plus je me
sentais mal, plus je mangeais. C’était un cercle vicieux infernal pour moi, je
n’étais pas vraiment grosse, je devais peser 55kg pour 1m63, mais je me voyais
comme une baleine, mon cas me semblait désespéré et j’étais prête à tout pour
perdre du poids. A tout, même à ruiner ma santé… Ce que j’ai fait, à force de
sauter des repas, de me bourrer le crâne en admirant, que dis-je, en adorant,
en adulant les femmes maigres ! J’avais même des cahiers où je collais des
photos de mannequins aux côtes saillantes et dans mon délire je trouvais ça
magnifique, je crachais sur les grosses (non pas au sens littéral), je crois
même qu’on pourrait comparer ça à du racisme anti grosse… J’étais devenue un
robot formaté par le culte de la maigreur dont la société nous bourre le crâne.
Mais j’en étais fière. (Quand je vous dis que mon problème était dans ma tête,
vous me croyez maintenant ?)
Le gobeur de nourriture! |
Forcément,
j’étais très mince à mon entrée au lycée, j’avais l’impression d’être belle,
d’être forte, de dominer le monde ! Ce n’était que pour mieux tomber du
piédestal sur lequel je m’étais placée… La rechute a vite pointé le bout de son
nez, et dès les premières baisses de moral, la nourriture est redevenue ma
meilleure copine, avec elle, c’était pour le meilleur et pour le pire… Mais
surtout pour le pire à ce moment là… J’étais malheureuse et je me goinfrais.
C’est triste à dire mais je me goinfrais comme un petit cochon, vous voyez
l’espèce d’aspirateur dans les teletubbies qui gobbe la nourriture sur le
sol ? Visualisez le bien, et mettez ma tête à la place de la sienne. Lui
et moi, on menait le même combat. Et c’est en me transformant en aspirateur à
bouffe, que j’en suis arrivée à peser 90kilos…
J’étais devenue obèse, sans même
m’en rendre compte. Je ne me voyais pas comme telle dans le miroir, mais quand
je revois mes photos, je me rends compte que j’étais devenue immense. Une vraie
baleine, un cachalot, un semi-remorque, un camion-benne même ! Être
malheureuse ne me réussissait vraiment pas, et j’aurais tout donné pour faire
partie de cette catégorie de personnes, qui, quand elles sont malheureuses
perdent du poids, mais non. Moi je me préparais des pâtes carbo pleines de
crème, je grignotais tout le temps, mes journées se déroulaient à coups de
gâteaux, de biscuits, de sandwichs, de pâtes en sauce, de riz à la crème, de
tablettes de chocolats et de pâtisseries… Et j’étais moi-même devenue une
grosse pâtisserie, une boule de gras, un loukoum bien tendre et bien moelleux.
Et
puis comme on ne peut que remonter après avoir touché le fond, j’ai déménagé,
j’ai changé de ville, je me suis fait de nouveaux amis et sans rien faire j’ai
commencé à dégonfler, petit à petit. Changer d’environnement m’a fait un bien
fou, comme une renaissance, je me suis rendue compte que je ne pouvais pas me
laisser aller comme ça, et même si on ne se remet pas d’une dépression en deux
deux, j’essayais de faire du mieux que je pouvais. En un an je n’avais pas
perdu plus de deux kilos mais mon état d’esprit avait changé, j’avais envie de
changer et de m’améliorer. C’était un premier pas vers la guérison mais je
n’avais pas encore la volonté de faire des efforts pour ça, j’avais l’envie de
changer mais pas la force. Voilà pourquoi je me suis dirigée vers l’hypnose
pour maigrir, une manière de maigrir sans produire d’efforts particuliers (ça a
l’air fabuleux dit comme ça, retrouvez mon expérience et mon avis sur l’hypnose
pour maigrir). Et plus que me faire maigrir, ces séances ont contribué à me
faire comprendre ce qui était bon et sain pour mon corps et ce qui ne l’était
pas. Elles ont, en quelque sorte, étaient le point de départ de mon
rétablissement. Il fallait changer quelque chose dans ma tête et c’est ce à
quoi elles ont servi, elles ont débloqué un truc en moi qui a fait que je
voulais le meilleur pour mon corps. Après ces séances, je n’ai plus été la
même, je faisais attention à tout, pas particulièrement aux calories mais
surtout à la provenance des aliments, à la confection des produits, aux ingrédients,
à leur conservation… J’ai même tenté de nouveau modes de vie :
végétarisme, végétalisme (j’écrirais un article sur mon expérience) et
finalement petit à petit, mes angoisses liées à la nourriture ont presque
disparues, mes écarts fous de grosse obsédée de nourriture bien grasse bien
réconfortante se sont faits de plus en plus rares, mais ils étaient toujours là
et ces craquages compulsifs me mettaient plus bas que terre, j’avais honte de
moi, car même s’ils étaient de plus en plus éloignés, ils étaient forts et je
mettais du temps à m’en remettre.
Les
anglais appellent ça du « binge eating », Google Traduction me dit un
gueuleton, moi je traduirais plutôt ça par la foire aux porcs, le rassemblement
des gros cochons avides de nourriture. Pour celles et ceux qui ne connaissent
pas le « binge eating », je vais vous donner une idée de ce que je
pouvais engloutir quand j’avais le malheur de craquer (bien entendu il s’agit
là d’un florilège non exhaustif de mes meilleurs craquages) : des paquets
de biscuits entiers (ENTIERS !) de petits écoliers de LU, de cookies
Cadbury, de BN chocolat, de gaufres hollandaises (mais oui vous savez celles
fourrées au caramel), de crêpes fourrées au chocolat, de mikado choco-noisette,
de brownie Brossard, le tout agrémenté de délices salés tels que du saucissons
sec aux noisettes, des sandwichs au camembert et au jambon, des chips de toutes
sortes (sauf celles aux légumes), des boîtes entières de surimis trempées dans
un pot de mayonnaise industrielle… Et j’arrosais le tout à grandes rasades de
jus de fruits, d’IceTea ou de coca. Une grosse, voilà ce que j’étais, une vraie
grosse, capable d’engloutir des quantités astronomiques de nourriture. Si ça
fait peur à certains, rassurez-vous, je souffrais d’une maladie et je m’en suis
bien remise. Aujourd’hui, je ne veux que le meilleur pour mon corps et forcément
quand on veut le meilleur pour son corps… On en arrive à penser au sport
(sérieusement même quand on est loin d’être sportive, comme moi, on sait que
c’est ça la réponse à toutes nos questions) et quand on pense au sport,
forcément on s’y met une bonne fois pour toute… Même si au début on n’est pas
motivée du tout ! (Retrouvez mon article sur mes débuts en course à pied)
Aujourd’hui,
le sport me permet de gérer mes envies de nourriture, car je ne vais pas vous
mentir, il m’arrive encore parfois de vouloir « m’empiffrer », plus
au point de ce que je vous ai décrit (et je pense que je n’arriverais plus à
engloutir autant de nourriture d’un coup) mais parfois un paquet de gâteaux me
fait de l’œil pendant que je regarde la télé ou bien je salive devant une bonne
assiette de pâtes ou un hamburger au bacon, mais à ce moment là j’utilise toute
cette envie pour la transformer en force et je me dis que j’aurais le droit de
manger tout ce dont j’ai envie à mon prochain cheatmeal, mais qu’avant de
pouvoir manger ces cookies ou ce burger, je dois les mériter (Découvrez ce qu’est
le cheatmeal et mes idées recettes).
Et
croyez moi, leur gout n’en est que meilleur après une bonne séance de sport !
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